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Dans mon ETA  ETA Prestagri : L’épandage de lisier sans tonne en aller-retour

Lorsque le tuyau est déroulé sur sa longueur de 650 m ou en bout en champ, le chauffeur fait une marche arrière et épand sur 18 m au centre de la rampe tout en enroulant le tuyau
Lorsque le tuyau est déroulé sur sa longueur de 650 m ou en bout en champ, le chauffeur fait une marche arrière et épand sur 18 m au centre de la rampe tout en enroulant le tuyau (©C.G.)
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L’ETA normande Prestagri intensifie ses prestations d’épandage de lisier sans tonne valorisant les effluents d’élevage et les digestats issus d’unités de méthanisation. Cette technique, utilisée dès l’hiver, lisse le travail du personnel et les entrées de trésorerie.

Depuis le printemps 2020, l’entreprise normande Prestagri propose des prestations d’épandage sans tonne de lisier et de digestat à ses clients. À ce jour, le volume annuel atteint 40 000 m3, avec une croissance de la demande effective chaque année. L’implantation d’unités de méthanisation chez des exploitants proches de l’entreprise a motivé cette orientation lors de la reprise des activités en 2020. Les deux associés, anciens salariés de l’ETA, ont investi dans un modèle Duaferti conçu par Matuboc. Ce matériel est équipé d’un enrouleur monté à l’arrière du tracteur et d’une rampe d’épandage de 36 m attelée sur le relevage avant. « Nous avons fait le choix de ce système doté d’un enrouleur. D’autres fabricants commercialisent des dispositifs à cordon nécessitant de dérouler un tuyau souple sur toute la parcelle. Cela peut convenir à des cultures faiblement développées en sortie d’hiver ou après une récolte. Mais nous avons fait le choix de l’aller-retour qui est une stratégie plus polyvalente pour intervenir sur des cultures plus développées sans risque de les abîmer », précise Nicolas Delaunay, cogérant de l’entreprise avec Cyril Lecointe. « Grâce à cet équipement, nous pouvons intervenir de janvier à juillet sur blé et sur maïs. De plus, sa largeur de travail de 24 à 36 m permet de répondre à la diversité des demandes de nos clients », ajoute-t-il. 

Au sein de l’exploitation, une pompe (régime moteur à 800 tr/mn au ralenti et 1 600 à 1 800 tr/mn au travail) prélève le lisier dans une fosse aérienne (© C.G.)

À la ferme, le lisier est prélevé dans une fosse enterrée ou aérienne via une pompe dont le régime de 800 tr/min au ralenti atteint de 1 600 à 1 800 tr/min au travail. L’organisation des chantiers dépend de la distance entre les parcelles et les exploitations d’où proviennent les produits épandus. Si la ferme se situe à moins de 1 km de la parcelle, un tuyau branché sur un dévidoir annexe relie la pompe au sabot de la bobine. Si la fosse est plus éloignée, la bobine est alors connectée à un caisson de 40 m3 positionné à l’entrée du champ et ravitaillé par des tonnes de transfert. Dans la cabine du tracteur, un boîtier commande par radio le groupe de pompage situé sur le caisson. « Trois quarts des épandages se font avec l’utilisation du caisson. Les chantiers sont très rapides à mettre en place et nécessitent la présence de deux salariés, l'un pour le transport du caisson et l’autre pour l’épandage. Pendant la période, deux binômes interviennent et doivent maîtriser l’organisation des chantiers en amont pour garantir leur efficacité. Même si nous sommes en capacité de développer l’activité, le facteur limitant reste la main-d’œuvre », commente l’entrepreneur.

Lorsque la parcelle est éloignée de la ferme, un caisson à l’entrée du champ relié à la bobine, est ravitaillée par des tonnes à lisier. (© C.G.)

Un épandage en deux temps

Sur chaque côté de la rampe de 36 m prennent place deux « chariots à pendillards » de 9 m de large. Ceux-ci se déplacent vers l’extérieur ou l’intérieur de leur côté de rampe sur une glissière, à l’aide d’une roue motrice entraînée hydrauliquement. Lors de l’avancement, ils se positionnent à chaque extrémité de la rampe. Le chauffeur déroule alors le tuyau long de 650 m et épand le produit sur l’extérieur des 36 m (9 m de chaque côté), laissant au centre une bande de 18 m ne recevant pas de lisier. Lorsque le tuyau est entièrement déroulé, ou bien à l’arrivée en bout de champ, le conducteur effectue une marche arrière, tout en repositionnant les chariots au centre de la rampe. Il épand alors à l’intérieur sur la largeur de 18 m.

Une roue motrice entraînée hydrauliquement déplace les chariots de pendillards. Des manchettes permettent de couper les tronçons de rampe pour choisir la largeur d’épandage (© C.G.)

Pendant cette phase, le tuyau est enroulé sur la bobine via un système de trancanage. La rampe d’épandage, montée à l’avant d’un tracteur John Deere 6210R de 210 ch, est reliée par un attelage à quatre points. Les deux points inférieurs sont les bras du relevage avant, et les deux supérieurs sont des vérins reliés au tracteur, au même niveau qu’un bâti de chargeur frontal. La bobine semi-portée, quant à elle, est attelée sur les bras du relevage arrière. Elle repose sur un essieu directionnel alimenté en continu grâce à un distributeur hydraulique du tracteur. La direction est gérée électriquement à l'aide de deux capteurs de position. Une prise électrique à l’avant assure le fonctionnement de la rampe, et une autre à l’arrière alimente le boîtier en cabine ainsi que le capteur de position situé sur la roue avant droite qui pilote l’essieu de la bobine.

En marche avant, l’épandage par pendillards se fait sur 9 mètres aux deux extrémités pour une largeur totale de 18 m. Le tuyau est ainsi déroulé. (© C.G.)
Un sabot relie le tuyau du caisson et le tuyau de la bobine. Un piège à balles permet de vider les tuyaux en fin de chantier. (© C.G.)

Un compactage limité des sols

Cet ensemble rampe-bobine-tracteur limite le compactage des sols. Son poids s’élève à 19 t (5,5 t sur l’essieu avant, 7,8 t sur l’essieu arrière et 5,6 t sur l’essieu de la bobine) et se voit donc réduit de moitié, en comparaison d’une tonne à lisier attelée à un tracteur. « De plus, notre John Deere 6210R dispose de pneumatiques 600/70 R28, qui sont plus larges que ceux du modèle 6930 utilisé avec un jeu de roues étroites pour les épandages sur maïs. Cette monte améliore l’emprise au sol et limite le tassement. Nous travaillons actuellement avec des pneus BKT de catégorie IF avec une pression de 0,9 kg à l’avant et de 1,4 kg à l’arrière », indique l'entrepreneur. Cette année, l'ETA a acquis des pneumatiques Bridgestone VF pour limiter davantage la pression et l’amener à 0,6 kg pour les quatre pneus

Le poids de l’ensemble rampe-bobine-tracteur s’élève à 19 T et limite ainsi le compactage des sols (© C.G.)

Le tracteur bénéficie d’un autoguidage par GPS. En cabine, le chauffeur renseigne la largeur d’épandage et le dosage à l’hectare souhaité par le client. Un débitmètre à la sortie de la bobine calcule le débit instantané. Tous ces paramètres déterminent ensuite la vitesse d’avancement. Cet équipement permet d’atteindre un rendement de 90 à 100 m3/h dans des conditions optimales, pouvant descendre à 50 m3/h lors de l’épandage de lisier épais de bovins ou de digestats non séparés. L’entreprise épand 80 % de digestat issu de stations de méthanisation privées, tout en incitant à la séparation de phases, soit 15 % de lisier de porc et 5 % de lisier de bovins.

(© C.G.)
Dans la cabine du tracteur, un boîtier Hermes commande le groupe de pompage sur le caisson par radio. Un autre boîtier (rouge) commande la rampe et l’enrouleur. Le tracteur est également autoguidé par GPS. (© C.G.)

Un tarif de prestation à l’heure

Pour amortir l'achat de cet équipement, incluant la rampe, la bobine, le dévidoir, le caisson et le groupe de pompage pour un montant total de 270 000 €, l'ETA applique un tarif de 348 €/h. Celui-ci est réajusté suivant l’évolution du coût du carburant (l’année dernière, la prestation était facturée 352 €/h). « Au démarrage de l’activité, nous proposions une grille tarifaire au mètre cube, variable par tranche de volume épandu. Le tarif s’élevait à 3,50 €/m3 pour un volume supérieur à 1 000 m3 et à 4,30 €/m3 si le volume ne dépassait pas 400 m3, détaille Nicolas Delaunay. Nous ajoutions également à la facture un forfait de mise en place du tuyau si la parcelle se trouvait à proximité du lieu de pompage. Cela a incité les clients à faire du cubage. Puis, compte tenu de la forte disparité entre les produits épandus, nous avons fait le choix, début 2024, de passer le tarif de facturation à l’heure. Cela nous permet de mieux optimiser les chantiers. » Le volume annuel épandu est passé de 10 000 m3 en 2020 à 13 000 m3 en 2021, puis a fait un bond à 40 000 m3 en 2022. 

Une économie d’intrants 

« En 2022, le prix des ammonitrates a subi une augmentation fulgurante pour atteindre 800 €/t. Cela a provoqué un engouement de la part des clients pour l’apport de digestat sur les céréales, raconte l’entrepreneur. Cela leur permet notamment de supprimer un apport d’ammonitrates et donc de faire des économies. Le digestat présente en effet une valeur fertilisante élevée, de trois à quatre unités d’azote par mètre cube, voire plus, soit plus du double de celle d’un lisier de bovins. Cet équipement optimise ainsi l’apport d’azote et facilite également la gestion des stocks d’effluents en sortie d’hiver, lesquels sont soumis à une réglementation en termes de temps de stockage. » 

Grâce à cet équipement, Nicolas Delaunay, co-gérant de l’entreprise avec Cyril Lecointe, peut faire intervenir ses salariés plus tôt dans la saison et bénéficie d'entrées anticipées de trésorerie. (© C.G.)

À ce jour, le volume annuel épandu avec cet équipement se stabilise à 40 000 m3. Sur le chiffre d’affaires global de l’ETA, s'élevant à 1,7 million d'euros, l’activité d’épandage de lisier sans tonne représente près de 150 000 €. « Comme nous pouvons intervenir sur céréales à partir du 1er février dans la Sarthe et du 15 février dans l’Orne et le Calvados, cela permet de lisser le travail du personnel qui est moins mobilisé à cette période de l’année », précise Nicolas Delaunay. « De plus, cela génère des entrées de trésorerie avant le printemps qui s’avèrent bénéfiques pour la consolidation de l’entreprise. Nous avons également étoffé notre clientèle. Les trois quarts de l’activité concernent des nouveaux clients. Le bilan se montre donc très positif », conclut l'entrepreneur.

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