Après avoir travaillé huit années chez un constructeur de matériels agricoles, Geoffroy Houette a repris en 2022 l’entreprise Werschuren, à Dol-de-Bretagne (Ille-et-Vilaine). Ce distributeur se démarque par sa stratégie axée depuis plusieurs décennies uniquement sur la vente et la réparation de matériels d’accompagnement, avec une forte orientation vers le maraîchage. Rencontre avec le gérant.
Décisions Machinisme & Réseaux : Présentez-nous l’entreprise Werschuren.
Geoffroy Houette : La société a été créée en 1938 par la famille Werschuren. Au départ, l’activité principale était le négoce de quincaillerie et de produits métalliques à destination, notamment, des forgerons de campagne et des artisans réparateurs. C’est par la suite qu’Albert puis Éric Werschuren, fils et petit-fils du fondateur, ont développé la vente et la réparation de matériels agricoles. Progressivement, ils se sont alors adressés en direct aux exploitants. La région est fortement marquée par la polyculture-élevage et la production de légumes, notamment sur toute la zone côtière allant du Cotentin jusqu’à Saint-Brieuc. Les principaux fournisseurs de la concession se nomment Kuhn, Grégoire Besson, Sulky, Monosem ou Arland pour la partie agricole. En légumes, l’entreprise est partenaire de constructeurs spécialisés comme Simon, AVR, Verhoest, Vanhoucke, Ferrari, Forigo ou Michalak.
DM&R : Votre établissement ne vend donc aucun tracteur ?
G.H. : Oui, exactement. C’était le choix des anciens propriétaires, et je compte bien conserver cette stratégie. L’entreprise s’est toujours focalisée sur le matériel d’accompagnement. Cela lui a permis de créer sa place et aussi de devenir un spécialiste reconnu du matériel légumier. Nous sommes assez peu nombreux en France à être aussi spécialisés. D’ailleurs, l’atelier ne propose même pas la réparation de tracteurs et ne vend pas non plus de pièces. Ce choix a sans doute aussi permis à l’entreprise de rester plus indépendante. Je m’explique : dans une concession standard, c’est toujours la marque de tracteurs qui prédomine et qui, parfois, impose ses objectifs. Quand les chiffres ne sont pas atteints, la menace de perdre la carte de distributeur est réelle. Il faut alors vendre du tracteur, quitte à délaisser les autres équipements. Chez Werschuren, nous ne subissons pas cette pression. Les efforts sont concentrés sur les attentes de nos clients. Deux exemples illustrent bien cela. Nous pouvons vendre jusqu’à 15 pulvérisateurs par an, ainsi qu’une vingtaine de charrues, sur un territoire commercial équivalant à peine à la surface d’un département. Les grandes concessions qui, elles, travaillent sur des secteurs souvent bien plus grands n’en font pas autant. Pourquoi ? Tout simplement parce que les commerciaux sont focalisés sur leurs objectifs de ventes de tracteurs et qu’ils ne s’occupent pas assez du reste. Nous allons donc maintenir cette politique à l’avenir afin d’apporter des réponses concrètes aux problèmes des agriculteurs. Dans le domaine de la pulvérisation, par exemple, le chef d’atelier est habilité à réaliser les contrôles périodiques des appareils. C’est aussi cette spécialisation qui a permis à l’entreprise de devenir un acteur important sur le créneau du matériel légumier.
DM&R : Quelles plus-values apportez-vous aux producteurs de légumes ?
G.H. : Nos réponses sont multiples. Cela commence par une offre très large afin de répondre à des besoins variés, compte tenu de la diversité des espèces cultivées. Nous proposons des solutions complètes pour le travail du sol, le semis et le repiquage, le binage, la protection des cultures, la récolte et aussi le conditionnement. Mais le point fort de l’entreprise, c’est surtout sa capacité à proposer des équipements adaptés au cas par cas. Très peu de concessions le font. À l’atelier, deux personnes travaillent pratiquement à plein temps sur la réalisation de machines sur mesure. La société a également embauché en 2024 un ingénieur qui modélise désormais chaque prototype en format numérique. Cela permet d’éditer des plans et de les faire évoluer plus facilement en conservant une trace précise. Nous partons très souvent d’une machine provenant d’un de nos constructeurs partenaires, sur laquelle nous apportons des modifications, car l’écartement entre rangs est différent, ou bien le client veut ajouter des outils complémentaires. Nos fournisseurs sont basés dans d’autres bassins de production légumière, en France ou à l’étranger. Ils produisent des équipements correspondant aux attentes de leurs agriculteurs locaux. Mais, chez nous, les maraîchers ont des pratiques différentes, liées au type de sol, au climat ou aux variétés qui ne sont pas les mêmes. À l’atelier, les soudeurs doivent donc avoir une sensibilité pour l’agronomie afin de comprendre ce que les clients attendent d’eux.
DM&R : Comment a évolué la société depuis votre arrivée ?
G.H. : J’ai tenu à conserver la même stratégie, tout en apportant quelques évolutions. La partie magasin et libre-service a ainsi été remise à neuf avec un espace plus grand et une offre élargie. Autre nouveauté : Werschuren adhère désormais à l’enseigne Promodis. Cela nous donne accès à un catalogue très large en matériels d’accompagnement. Nous distribuons aussi le matériel de pulvérisation ultralocalisé Ara d’Ecorobotix, fonctionnant grâce à des caméras et de l’intelligence artificielle. Ce type de technologie sera de plus en plus présent à l’avenir, il est donc important d’être présent sur ce créneau. Pour le reste, peu de changements. Il n’était pas question pour moi de bouleverser un modèle qui fonctionnait bien. Nous conservons notre spécialisation en matériels pour les légumes et continuerons à apporter le meilleur accompagnement possible aux producteurs.
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